Mon fils traine partout un lapin : son « doudou » fétiche. L’animal est en piteux état, sale et sent en général plutôt mauvais. A l’école, ses camarades le traitent de « bébé ». Je ne peux pas imaginer que, l’année prochaine, au CP, il garde encore cette horrible peluche avec lui. Dès que je le cache ou le lave c’est un invraisemblable drame : il pleure, hurle, tape… manifestement il est impossible pour lui de s’en séparer. Comment faire ?
Le « doudou » est ce qu’on appelle un « objet transitionnel ». Il assure la transition entre la maison et l’extérieur. Il est très important sur le plan du développement affectif et pour la construction de la pensée. Cet objet est, schématiquement, ce qui relie l’enfant à sa mère, même lorsqu’il grandit. En général c’est la mère qui a proposé l’objet qui deviendra le « doudou » et c’est l’enfant qui l’a choisi. Il lui permet de comprendre que ce qu’il ne voit plus existe encore, même hors de son regard et que ses parents sont des personnes différentes de lui. Il le sait de manière définitive vers 3 ans.
Ce doudou rassure, console, réconforte, apaise… entre monde imaginaire et réalité il « remplace » la mère lorsqu’elle est absente ou occupée ailleurs et permet donc de s’en séparer en se sentant plus en sécurité.
En général, on abandonne son doudou, au moins la journée, quand on entre à l’école. Les enfants acceptent en général de le laisser à la maison. Ils le réservent aux moments de repos. Il est important de leur permettre de le conserver mais pas n’importe où, n’importe quand. Un doudou c’est intime.
En petite section de maternelle il existe encore des « paniers à doudous » où les enfants peuvent les déposer quand ils sont occupés par les activités puis le retrouvent au moment de la sieste.
Christine Brunet et Anne-Cécile Sarfati proposent de l’aider à « décrocher » en limitant l’usage du doudou, d’abord dans l’espace (seulement à la maison mais pas quand on sort) puis dans le temps (seulement pendant la sieste ou la nuit).
Si c’est trop difficile pour l’enfant c’est peut être pour rester confiné dans le statut de tout-petit. Pourquoi votre fils désirerait-il cela ? C’est aussi un signe de dépendance à la mère. Lui permettez-vous de grandir à cet enfant ? Comment vivez vous son entrée à l’école primaire ? Si vous entretenez ce lien un peu trop fort qui sans doute vous unit vous risquez de freiner le développement de son autonomie et de le retarder dans ses apprentissages.
Donc il faut absolument lui apprendre à s’en séparer, le rassurer, trouver les mots pour lui dire que ses copains laissent le leur à la maison, que maintenant il est grand et que vous savez qu’il peut s’en passer. Cette séparation progressive a toutes les chances de réussir. Il faut sans doute aussi être ferme, lui imposer cette frustration qu’il va surmonter parce que c’est aussi cela grandir.. c’est ainsi que vous l’aiderez à prendre une décision qu’il a du mal à assumer seul.
Et puis un doudou, on le lâche quand on est prêt…
Un pédopsychiatre renommé, Marcel Rufo, tempère beaucoup l’attachement au doudou : il est lui même entré à l’école primaire avec… sa tétine, dit-il…